Des manches aux pieds de table... Cardin le mal aimé

Pierre Cardin (1922 -)
Grand enfant, styliste visionnaire, homme d'art et loup des affaires, Pierre Cardin est un mélange détonnant. Bernard Arnault, Gaultier, Stark et Aladin en un seul corps.
Comme beaucoup de couturiers, il fait son apprentissage à 14 ans chez un petit artisan, un tailleur de St Etienne. Petit artisan qui devait être un grand tailleur, puisque Pierre Cardin monte ensuite à Paris. Il débute chez Paquin, l'un des grands noms de l'époque puis chez Shiaparelli. J'imagine que c'est cette grande amoureuse de l'art qui lui a transmis le gène du design. 

Pierre Cardin est débauché par Christian Dior lui-même comme premier tailleur en 1946, dès l'ouverture de la Maison Dior. Avec un CV pareil à 24 ans, il peut en faire pâlir plus d'un.

collection accessoires Pierre Cardin - 1960
En 1950, il rachète Pascaud, une maison spécialiste des costumes de scène et ouvre sa propre maison de couture (par la suite, Cardin dessine des costumes pour de nombreux artistes, Jean Marais, les Beatles, Diana Rigg... le costume le fascine).
Pour sa première collection, il n'hésite pas à faire gravir 7 étages à pied aux plus grandes journalistes de mode qu'il a réussi à convaincre de se déplacer. Imaginez Anne Wintour regarder un défilé dans une chambre de bonne... L'anecdote en dit long sur la force de persuasion de Mr Cardin.

Mia Farrow en Pierre Cardin 
Sa robe bulle créée en 1954 le lance sur la scène internationale. Complètement futuriste, à l'opposé des codes "jolie madame" de l'époque, Pierre Cardin montre déjà son amour du design et son esprit extravagant. Il enchaîne le succès jusqu'en 1957. Cette année-là, il décide d'habiller "la rue". Et se lance dans le prêt à porter. Scandalisée, la Chambre de la Haute Couture le bannit pour 5 ans. Cardin n'en a cure. Il s'amuse comme un enfant, imagine, crée... et vend à tour de bras! Sa ligne pour hommes marche du tonnerre, grâce à ses cravates colorées qui rajeunissent le style masculin.

Pierre Cardin, c'est l'inventivité, des idées pétillantes, l'horreur des carcans. Il n'est pas provocateur mais trublion. Il sème des idées dans tous les sens, comme d'autres les petits pois. Et il n'y va pas de main morte! Après la cravate, le col est mis sens dessus dessous. Col mao, col plateau, col cerceau d'organdi, Pierre fait le fou. Puis les matériaux : textiles, plastique, métal. Les accessoires. Il détourne tout. D'un voyage au Japon, il ramène une égérie : la jolie Hiroko, mannequin japonaise qui l'accompagnera 10 ans.
robe Pierre Cardin - 1970
En 1970, il dessine une ligne de meubles qu'il baptise "Sculptures utilitaires" : sens de la dérision et esprit commercial. Ouvre une scène de spectacle, l'Espace Cardin. Rachète Maxim's en 1981. 

commode en ronce de tuya - Pierre Cardin
Il est reçu en 1992 à l'Académie des Beaux Arts, preuve que les artistes sont moins à cheval sur les conventions que les couturiers. Il y prend le siège de Pierre Dux, acteur et metteur en scène, deux talents que possède bien Cardin!
Cardin est toujours le mal aimé de la Couture. Trop avisé, trop en avance sur son époque, trop riche, trop peu soucieux de se cantonner à un monde fermé. L'histoire a prouvé depuis à quel point il était visionnaire : toutes les maison de couture tirent leurs plus gros bénéfices aujourd'hui de leurs lignes prêt-à-porter et accessoires, tel que l'avait compris Cardin en 1957, toutes se sont ruées au Japon et en Chine (Cardin s'est installé à Pékin et à Shangaï dès 1978!!). Et de Lacroix à Lagerfeld, on ne compte plus ceux qui ont "habillé" une bûche Ladurée, voire une bouteille de Coca... 

collaboration Pierre Cardin pour Paul & Joe - 2008
Nul n'est prophète en son pays. Fantaisiste, homme d'affaire avisé, amoureux de l'art sous toutes ses formes et un brin mégalo (soyons honnêtes), Cardin souffre depuis 30 ans d'une image de vieux ringard en France ; il s'en console avec son succès aux Etats Unis, au Japon, en Chine... et dans le monde entier. Avec ses 700 licences. Dont certaines font sourire : eau minérale, cigarettes... Mais lui valent la richesse. Et le plaisir de voir, de son vivant, son nom transcrit en 110 langues. Plaisir qui n'est pas donné à tous les couturiers. 

Un grand merci à toutes celles qui ont joué le jeu de la devinette du lundi!
Et bravo à Eudoxie et Béa, qui ont reconnu le grand homme derrière la petite phrase...


Pour aller plus loin : Pierre Cardin, site du couturier
Musée Pierre Cardin - St Ouen

A lire : Pierre Cardin, 60 ans de création (Ed. Assouline)

modèle de soirée - 1986
modèle de soirée - 1992



stelda

12 commentaires:

  1. Perso je suis pas trop fan des robes double - emploi :
    -La robe qui fait aussi blouse de ménage
    -La robe verte et orange : parasol pour gnomes
    -La bleue me fait penser à des tagliatelles faites maison en train de sécher ou alors à du linge sur son étendoir
    -Et je dirai rien sur la rose car je risque d'être très critique.

    Et surtout je peux en mettre aucune, c'est peut-être pour ça que je n'adore pas !

    Lady E

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  2. Lady E, sois critique!!! La robe rose te fait penser à quoi ? une bulle de chewing gum en devenir ?

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  3. je suis d'accord avec Lady E, les robes double-emploi c'est nul!

    je suis une grande admiratrice de Cardin, mais il s'est parfois lâché un peu trop à mon goût!

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  4. Cardin est de la race de ceux qui expérimentent et se trompent donc parfois. Il est un peu comme un chercheur dans son labo, parfois ça ne fonctionne pas. La robe rose est hideuse mais la robe cagoule sur la couverture du livre est SU-BLI-ME ! Il n'y a que ceux qui n'essaient pas qui ne se trompent jamais.

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  5. Hé hé, en effet, j'avais trouvé... c'est vrai que Cardin a une réputation poussiéreuse et ring' en France, et j'avoue que je ne comprendrai jamais pourquoi. Ha, sa période 60/70 est pour moi tout simplement fabuleuse, j'ai d'ailleurs dégotté des vieux Paris Match de cette époque dont il fait la couverture que je regarde régulièrement... merci pour ce billet !!!

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  6. Dis donc il est superbe ton blog Stelda ! Félicitations ^^ Des Bubble bisous et une belle journée !

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  7. @ Lady B et LaPtiteMadeleine : je suis complètment d'accord et je suis loin d'aimer tout ce qu'il a créé. Mais il a le mérite d'avoir expérimenté, comme un Gaultier ou un Poiret. Avec des erreurs et des fautes de goût mais aussi une vraie énergie. J'avais vraiment envie de le "réhabiliter" un peu ;-).
    @ Béa : oui, t'es trop forte!! Je suis contente que ce billet t'ai plu ;-)

    @ Bunny : merci, tu es adorable. Bisous à toi et à très vite

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  8. Super intéressant en tout cas comme article, j'ai appris plein de trucs ^^

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  9. Bon Ok la robe cagoule est vraiment top ...


    ... si on envisage de faire les JO en patinage de vitesse !

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  10. @ Pipou : merci ;-)

    @ Anonyme : faut avouer qu'elle est plutôt aérodynamique, non ? :D

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  11. ah oué j'etais à côté de la plaque, avec Armani, moi... :-)

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  12. Jicky, ils ont plus de points communs qu'on ne le croit ;-)

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