Le jour où j'ai rencontré Sophie Fontanel


"Ca va être horrible, si les filles sourient. C'est pas photogénique.
- Ca l'était autrefois.
- Ca ne l'est plus. C'est pas moderne. Ca ne marchera pas.
- Pourquoi les filles ne souriraient-elles pas ?
- Et elles vont jamais accepter, en plus. Elles vont se sentir ridicules.
(...)
-Tu crois pas qu'on a vocation de galvaniser les gens qui nous lisent, de leur donner une ardeur et non de les plomber avec des filles morbides habillées comme des cauchemars ?
- On dit ce qui est à la mode, c'est ça notre métier.
- Oui, mais la mode, c'est nous qui la faisons, aussi, tu ne crois pas ?"

Dialogue surréaliste entre l'héroïne du roman La Vocation, directrice de la mode chez ELLE qui veut "faire du gai" et sa collaboratrice styliste qui veut "être moderne". 


Contrairement à la plupart des journalistes qui ont parlé de La Vocation, je ne connais pas Sophie Fontanel, je n'avais lu aucun roman d'elle non plus mais j’avais trouvé la publication de L’Envie hyper courageuse, cette façon de refuser de rentrer dans la boîte pour faire plaisir aux autres, de se plier à des points de vue étrangers qui s'occupent de ce qui ne les regardent pas. 

Avec La Vocation, Sophie Fontanel raconte une autre injonction : la mode préfabriquée, l'exigence d'acheter l’air du temps, la course au semblant au lieu de garder son énergie pour être, regarder, rire, aimer, être en accord avec ses désirs. Finalement, on en revient à L’Envie. 

Ici, Sophie Fontanel met en parallèle son amour des vêtements et l'amour des vêtements de ses aïeux, racontant comment les vêtements façonnent des vies. J’ai quitté La Vocation à regret, comme on retire un plaid en laine bien épaisse, j’étais enveloppée dans l'histoire de ces femmes qui traversent le XXe siècle. J’ai un peu souri et un peu pleuré en le fermant : je ne suis donc pas la seule à repérer la touche de jaune dans un blanc cassé ni à crier de frustration en voyant ce grand gâchis qu'ils nous font de la mode. Et qu'on laisse faire, parce que c'est pas grave, hein, c'est que des chiffons. Mais avec des vraies femmes dedans. Et ça, tout le monde l'oublie, nous les premières.


"Qui fut la plus heureuse des deux ? nous demande la quatrième de couverture. Méliné, qui cousait elle-même ses robes et admirait les belles dames depuis un banc, boulevard du Montparnasse, à Paris, dans les années 1930, ou Sophie, placée au premier rang des défilés de mode, avec un titre rutilant et du pouvoir ? Et ou est l'élégance tant rêvée, au bout du compte ?"

J’ai ma réponse. Et j'ai l'impression d'avoir rencontré Sophie Fontanel.

 
La Vocation, de Sophie Fontanel. Ed. Robert Laffont 324 p., 19 €.


















Source photo : ELLE.be

stelda

9 commentaires:

  1. C'est chouette. On sent que tu as vraiment aimé ce livre, ça donnerait envie si je n'avais pas tant de livres à lire (mais je ne me plains pas !). Bises,
    Maeve

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    1. Oui, c'est un joli livre. J'ai beaucoup aimé les deux histoires qui se tissent en parallèle jusqu'au moment où elles se rejoignent et l'écriture est vive.
      Je te le garde au chaud pour quand tu veux :)

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  2. Je n'ai jamais lu Sophie Fontanel mais je me souviens bien d'une interview à propos de L'Envie que j'avais trouvé très intéressante. Vous me donnez envie de la lire, Stelda. - N.

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    1. Merci Nina ;) oui, elle a un regard différent et c'est intéressant.

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  3. Hello !
    (et coucou coucou, je passe toujours régulièrement)
    Petit extrait bien sympa. Ca me donne envie d'essayer de le lire
    à bientôt
    Vic'

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    1. Voilà, je joue encore les tentatrices! Gros bisous Vic et à bientôt sur Paris ;)

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    2. Ah ! Ça c'est cool !

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  4. Oh voila encore un nouveau livre qui me fait envie! Je le rajoute avec plaisir à ma future liste de lecture :)
    Bonne journée à toi
    Clementine

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