Les créateurs de mode se composent de 2 clans ; les gros, ceux qui disposent d'un budget illimité et d'ateliers dont l'excellence leur permet de réaliser à peu près tous leurs fantasmes techniques et les petits.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, les petits créateurs (qui tiennent une boutique atelier ou vendent sur Dawanda, ALM...) sont souvent ceux qui innovent le plus.
Leur manque de moyens financiers et/ou leur inexpérience en modélisme ou en finition les obligent à recourir au système D pour contourner leurs limites techniques.
- La coupe à cru : le travail du flou (soie, satin, mousseline) est extrêmement délicat... pour contourner une partie de la difficulté, on oublie l'ourlet. Résultat : un effet effiloché, plus léger, plus jeune (mais qui ne survit pas toujours au lave-linge). Idée reprise par moultes Maisons ou fabriquants (de Lanvin à H&M)
- La finition roulottée : idem pour la maille. L'ourlet, là aussi, nécessite une certaine maestria... qu'on contourne en terminant les bas de manches ou de jupe d'une piqûre en zigzag sur le tissu étiré et qui produit cette finition roulottée très vue il y a quelques années.
- Escamoter la doublure, le cauchemar des couturières : la doublure est difficile à ajuster, et le tissu doit etre de qualité pour ne pas s'érailler, tirer, se déformer ou rétrécir au lavage ou au pressing. Plus de doublure, on gagne 50% de temps à la fabrication + le cout du tissu... Multiplié par 10 ou 100 000 pièces, le gain est loin d'etre négligeable. Vive la couture à l'anglaise ou le biais pour terminer les coutures intérieures! Idée qu'ont repris Zara, H&M mais bien d'autres, que je ne nommerai pas...
- Les boutons dépareillés : un petit côté déglingue sympa... initié par des créateurs qui ne pouvaient pas acheter de boutons en gros et ont racheté des fins de séries à droite et à gauche. Une idée reprise depuis par de nombreuses marques, de Marithé+François Girbaud à Monoprix...
- Le sac à main en tissu : il a envahi les petites boutiques il y a 10 ans. Tout le monde n'a pas de machine double ou triple entraînement, dont le moteur supporte la crôute de cuir. Pas toujours facile non plus de trouver des grossistes en peaux. Là encore, système D : de petits stylistes ont remis le tissu à l'honneur en utilisant tissu d'ameublement, toile cirée... Et les grandes marques de maroquinerie qui ne proposent pas actuellement une ligne bis en tissu se comptent sur les doigts de la main!
- Les bijoux : boutons de nacre, fils de coton, perles de bois, liens de cuir, coquillages, pièces de monnaie, cordons en crochet... mille et un petits matériaux ont été détournés pour concevoir de la joaillerie fantaisie, colorée, décalée et originale.
- Le cuir coupe à cru : comme pour le tissu, le sac à main a pris un coup de jeune... grâce au manque de connaissances techniques de jeunes maroquiniers! Ces finitions brutes ont donné un coup de peps au sac de dame. Sequoia, Furla et bien d'autres ont sauté sur l'idée.
La liste est longue. Dans tous les cas, le résultat est le même. Des créations plus simples à fabriquer, moins gourmandes de matières premières et de main d'oeuvre. Et des pièces plus oiginales, nées de l'union de la débrouille et des rêves.
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| défilé Lacroix 2009 |
En 2009, Lacroix met la clef sous la porte. Cette fois, impossible pour lui de passer commande de tissus spéciaux. Alors il réalise son dernier défilé grâce aux fins de roulaux qui traînent dans l'atelier et avec l'aide de ses partenaires et fournisseurs. La collection est éblouissante. A mon avis, l'une des meilleures de Lacroix.
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| défilé Lacroix 2009 |
Limité dans ses moyens, le couturier a dû aller à l'essentiel, choisir des coupes et des détails qui fassent de l'effet, mettre en valeur les tissus. Il a travaillé à l'envers. Durant 20 ans, il disait "je veux faire ça" et commandait tissus, dentelles, boutons, broderies, chaussures et chapeaux qui mettraient en scène ses fantasmes. Cette année-là, il s'est dit "j'ai ça, j'en fais quoi ?" Alors il s'est remué les tripes pour créer des silhouettes ultra féminines, délicates et stylisées.
Preuve est que le talent n'est pas affaire d'argent.
Et je vous laisse avec une chanson que j'adore ; il n'y a pas vraiment de rapport si ce n'est peut-être que les grandes maisons ou les grosses marques devraient parfois se rappeler la couleur des blés et dans quel sens fonce leur train ;-)
L'actu 
et puis, il fait de tellement jolis foulard et carrés de soie, Lacroix...
RépondreSupprimerAh c'est marrant! Sur ta vidéo, je tombe sur une fille de ma classe: la jeune nana de l'atelier, Adeline. D'ailleurs j'ai vu que Lacroix lançait un partenariat lingerie avec Lejaby. J'ai hâte de voir ça.
RépondreSupprimerJe t'encense depuis le début, mais là, avec tout le respect que j'ai pour toi, et l'amour -oui, cet article est just perfect.
RépondreSupprimer(nb : tu me surprendras toujours, Blankass???!!)
Jicky, je trouve que c'est dans le foulard, cette pièce de rien du tout, que les créateurs s'éclatent le mieu! On y retrouve la quintessence de leur patte. Et chez Lacroix, c'est canon!
RépondreSupprimer@ Eudoxie : ça, c'est rigolo! Qu'est-ce que j'aimerai que Lacroix puisse renaître... Faut que je fasse un article rien que pour lui ;-)
@ Bree : roooh, je suis toute rouge! Merci... c'est un article qui traînait dans ma tête depuis des semaines, et voilà! j'étais inspirée hier soir :D
Hé ouais, j'adore Blankass!!! J'ai tous les albums, je les écoute en boucle. Ma préférée ? Soir de Paye. Un moment d'anthologie! Je réussirai bien à la caser dans un article, t'inquiète, mouahhh!
Franchement j'adooore tes articles et celui-là ne fait pas exception.
RépondreSupprimerTu soulèves des points qui sont juste trooop bien vus et c'est un superbe hommage à tous ces petits créateurs inventifs et débrouillards!
Pipou, merci, merci, merci! Tu es un amour <3
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