Les petites mains




 François Lesage est mort. Je n'en ai guère entendu parler sur les blogs mode et je trouve ça triste.
Cette petite main grâce à qui les rêves des stylistes se concrétisent, cette petite main qui était l'âme d'un savoir-faire ancestral.
J'ai un peu envie de pleurer.
J'aurais aimé qu'on parle de son oeuvre et de celle de ses ouvrières.
Celles qu'on ne voit jamais et qui brodent 12 heures d'affilé la veille d'un défilé...
Celle qui ont les doigts piqués et les yeux usés.
Celles qui sont discrètes et secrètes mais qui fabriquent de la lumière.
Je n'ai malheureusement pas eu le temps de faire beaucoup de recherche sur son travail mais je tenais à lui rendre hommage et à le remercier d'avoir gardé la flamme.
Mr Lesage était fils de brodeur et de couturière, sa mère travaillait chez Vionnet. Son fils, Jean-François, a créé à Madras un atelier de broderies de linge de maison et produits de décoration de luxe (coussins, draps, tenture...), bref, c'est un patrimoine génétique plus qu'un métier.

Le savoir-faire de Lesage a permis en partie la renaissance de la haute couture. Réciproquement, ce sont les envolées extravagantes de Lacroix, Galliano et Lagerfeld qui ont permis à Lesage de survivre.
En bon artisan, ayant en tête le désastre de 1929, il mit pendant quarante ans les bénéfices de côté. Ils seront "mangés" par la crise de 1992. Dix ans plus tard, Chanel rachète l'affaire : "Afin de pérenniser et de fixer en France un savoir-faire indispensable à la haute couture, mais aussi au prêt-à-porter de luxe", indique Bruno Pavlovsky, président des activités mode de Chanel.
modèle pour Saunt-Laurent
"Un jour, Yves Saint Laurent l'appelle : "Venez voir." Il accourt. Saint Laurent lui montre le reflet du lustre en cristal et du ciel de Paris, dans le miroir de Lalanne, et lui dit : "Je voudrais ça." M. Lesage revient avec trois versions, les lumières du matin, du midi et du soir. Saint Laurent s'exclame : "C'est merveilleux ! On va toutes les faire."
A raison de 350 heures de broderie pour chaque pièce...
Il en réalisera une : la veste piquée de cabochons, pampilles et feuilles d'or, joyau solaire que Saint Laurent baptisa "Hommage à ma maison" (source Le Monde)

Lesage brode pour les couturiers mais également pour les gantiers, les chausseurs et les académiciens...
La Maison Lesage a reçu le label Entreprise du Patrimoine Vivant.

Louboutin

Pour aller plus loin : Maison Lesage

A voir : exposition les Maitres d'Art, Galeries du Palais Royal, à Paris jusqu'au 15 janvier 2012.

stelda

8 commentaires:

  1. Malheureusement, je ne suis pas étonnée que peu de blogs mode aient parlé de son décès, je pense que la plupart des nanas ignorent qui il était et ce que lui doivent, à lui et à toute les petites mains, beaucoup de grands couturiers. Je suis inquiète de sa succession, si succession il y a. Je crains qu'avec sa mort, cette maison disparaisse et avec elle un savoir-faire irremplaçable.

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  2. C'est vrai tu as raison, dans l'ombre toutes ces petites mains réalisent des travaux d'une infinie beauté. Et on en parle vraiment pas assez ! Quant à ce Monsieur avec son si grand savoir faire, on peut c'est vrai se demander ce que tout ceci va bien devenir..... pourvu que cela perdure dans le temps. De ci jolies choses, un art !
    Bisous ma Stelda :)

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  3. C'est clair que les petites mains sont souvent oubliées et c'est bien dommage! (enfin toi tu ne les a pas oubliées et c'est cool ^^)

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  4. @ LaPtiteMadeleine et Lilily : Lesage ayant été racheté par Chanel, je pense que les Wertheimer sauront sauvegarder le savoir-faire et l'esprit de la Maison. Et c'est peut-être un de ses enfants, Jean-François, par exemple, qui reprendra la relève.

    @ Pipou : ça m'a fait mal au coeur, j'avoue... Quand MacQueen est mort, toutes les modasses en ont parlé 6 mois... mais ce sont des petites mains comme celles de Lesage qui réalisaient ses merveilles!
    Et que Lagerfeld n'en parle pas, ça m'a tuée!! Juste une brève sur Tendance de Mode, un article chez une ou deux blogeuses couturière... et basta! The show must go on... c'est le côté que je déteste dans la mode. Les artisans y sont vampirisés.

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  5. Ps, tu vois craignant un peu la déferlante d'article obligés, mitonnés par des filles qui découvrent l'existence de Lesage le jour de sa mort, j'ai préféré ne rien faire. Moralité, mes craintes étaient vaines et il faudra que je rattrape ça très vite. Après tout c'est pour lui qu'il faut le faire, sans se demander si on va jouer aux petits moutons oui ou non.

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  6. C'est ce que j'ai pensé aussi, figure-toi! Je m'attendais à une déferlante de billets, eh ben non!
    On est naïve, hein ?
    Fais-lui un bel article, plein de dessins, Eudoxie...

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  7. 2 mots : respect et admiration.

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  8. Tu résumes bien ma pensée, Gweny!

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